Conséquences de la guerre de Gaza: Un «plus grand djihad» attend les Palestiniens
Les effets de la quatrième guerre israélienne contre Gaza ne devraient pas s’estomper, du fait des conséquences qu’ils entraîneront dans de nombreux pays et organisations. Bien des parties se voient déjà comme victorieuses, principalement celles formant l’Axe de la Résistance en Palestine, au Liban, en Syrie, en Irak et au Yémen. D’autres, comme Israël, les USA, l’UE, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, chercheront à contrecarrer la victoire du Hamas et à saper sa position en Palestine. Il ne fait guère de doute que les Palestiniens auront à relever de grands défis à bien des égards. L’heure du « grand djihad » a sonné.
Israël a démontré sa puissance destructrice dans chaque guerre qu’il a menée contre le Liban et Gaza. Lors des quatre guerres contre Gaza en 2009, 2012, 2014 et 2021, Israël a détruit des installations civiles, des infrastructures et des habitations, en faisant un nombre extrêmement important de victimes parmi la population civile. Après chaque bataille, les responsables israéliens ont déclaré avoir anéanti les forces du Hamas derrière les attaques à la roquette, tué de nombreux responsables du Hamas et détruit la plupart des entrepôts de missiles. Sauf qu’à chaque nouvelle guerre, force est de constater que la capacité militaire tactique de la Résistance palestinienne et sa capacité d’entreposage augmentent, que ses tirs sont plus intenses et qu’elle lance de nouveaux missiles à longue portée. Dans chacune de ces guerres (y compris lorsqu’Israël n’est pas en guerre contre Gaza), les Nations unies déclarent que des crimes de guerre ont été commis, sans qu’aucune mesure ne soit prise.
Israël a affirmé avoir détruit les tunnels de Gaza, ce que personne ne peut voir et vérifier. Israël a également déclaré que le Hamas a demandé un accord de cessez-le-feu. Toutefois, le premier ministre Benjamin Netanyahou a déclaré que c’est le président des USA Joe Biden qui l’a imposé et que le conseil des ministres, le chef d’état-major, le chef du Shin Bet, le chef du Mossad et le chef du Conseil national de sécurité ont convenu d’un cessez-le-feu sans condition. Cela indique que Netanyahou avait besoin d’une décision collective pour que le blâme ne soit pas rejeté uniquement sur lui à un moment de forte redevabilité politique sur le plan intérieur.
Dans cette dernière guerre contre Gaza, la banque d’objectifs d’Israël visant des militants de premier plan n’a rien changé au fait que plusieurs villes israéliennes ont été bombardées pour la première fois, que l’intensité des tirs de roquettes et de missiles s’est maintenue du premier au dernier jour et qu’ Israël a causé des destructions massives sans parvenir à affaiblir les capacités du Hamas. Pour la première fois, des roquettes lancées de Gaza ont frappé Jérusalem et Tel-Aviv, à la surprise des responsables israéliens qui ont choisi de déverser leur colère contre la population civile, principalement en raison de leur banque d’objectifs mal définie.
Dans le cadre d’entretiens menés avec plusieurs pilotes israéliens ayant participé au bombardement de neuf immeubles résidentiels à plusieurs étages, y compris l’immeuble qui abritait des médias étrangers (Associated Press) à Gaza, un pilote israélien a révélé à la chaîne israélienne Channel 12 que ce bombardement était un moyen d’évacuer la frustration liée à l’incapacité de stopper les tirs de roquettes en provenance de Gaza.
Un des pilotes israéliens a déclaré : « Je suis parti en mission pour effectuer des frappes aériennes avec le sentiment que la destruction des tours (civiles) était un moyen d’évacuer notre frustration par rapport à ce qui nous arrivait et au fait que les groupes de Gaza soient parvenus à nous frapper. N’ayant pas réussi à arrêter les tirs de roquettes et à nuire aux dirigeants de ces groupes, nous avons alors détruit les tours. »
Netanyahu a prétendu avoir infligé de graves dommages au Hamas. Dans les faits, les autorités israéliennes locales ont cessé d’expulser les résidents palestiniens du quartier de Sheikh Jarrah à Jérusalem. Elles ont empêché les non-résidents juifs d’y accéder ou d’y faire des ravages. En outre, pendant vingt jours, les Juifs ont été empêchés d’accéder à la zone d’Al-Aqsa, alors que les manifestants palestiniens étaient autorisés à s’y rendre et à prier dans la mosquée sacrée.
Les premières roquettes du Hamas qui sont tombées sur Jérusalem et Tel-Aviv ont enflammé les Palestiniens d’Akka, de Lod, de Ramallah, du Néguev, de la Galilée et de Wadi Ara. Ils ont soutenu la Résistance palestinienne et se sont soulevés comme ils ne l’avaient pas fait depuis 1949, lorsqu’Israël a détruit 400 villages palestiniens et accompli son plus grand acte de nettoyage ethnique contre la population palestinienne. La réaction palestinienne s’explique par l’accumulation d’injustices, d’abus et de meurtres en toute impunité, qui ne provoquent aucune intervention ou condamnation dans le monde pour les faire cesser.
Les missiles de Gaza ont frappé les bases militaires israéliennes de Hatzor, Hatzerim, Palmachim, Rehovot, Nevatim, Tel Nof et celle de Ramon, dans le sud. Des villes israéliennes et l’aéroport Ben Gurion ont été fermés, les vols internationaux ont été suspendus et les pertes quotidiennes subies par l’économie israélienne se chiffraient à 100 millions de dollars, auxquelles s’ajoute le coût de l’équipement militaire utilisé, pour un total dépassant un milliard de dollars US. Il est évident qu’Israël n’avait prévu aucune stratégie pour cette guerre et qu’il est passé de la réaction à la destruction.Les villes, les colonies et les bases militaires israéliennes ont été bombardées par des missiles iraniens. La Résistance a tiré des missiles portant la mention « Sakht Iran » (fabriqué en Iran). Ce « message » de l’Iran et de Gaza lancé au premier ministre Netanyahou signifiait qu’ils ont amplement les moyens de répliquer à ses milliers de raids sur la Syrie au cours des dix dernières années, comme les 4 300 frappes en dix jours l’ont prouvé.
L’Axe de la Résistance a inscrit de nombreux succès dans cette dernière guerre impliquant Gaza. Le premier est venu du président syrien Bachar Al-Assad, qui a salué le retour du Hamas à Damas. Ces dernières années, le secrétaire général du Hezbollah, Sayyed Nasrallah, a tenté à plusieurs reprises d’amener Assad à accorder son pardon au Hamas, mais en vain. Assad a répondu que « la blessure est profonde », en faisant référence à l’implication du Hamas aux côtés des takfiris dans le meurtre de Syriens pendant de nombreuses années.
Du côté du Hezbollah, Sayyed Nasrallah s’est délibérément abstenu de prononcer un discours ou d’annoncer la moindre implication ou un quelconque plan pendant la guerre en cours pour ne pas détourner l’attention de ce qui se passe à Gaza. Le Hezbollah a évité d’endosser officiellement toute attaque contre Israël à partir de la frontière libanaise pendant la guerre, afin que Netanyahou ne saisisse pas l’occasion d’appeler au soutien international et de détourner l’attention des massacres commis par son armée à Gaza. Israël a fermé un œil et le Hezbollah a transmis le message que sa participation directe n’était pas à exclure. Une intervention du Hezbollah aurait favorisé et entraîné le soutien américain à Israël. N’empêche que le front interne israélien se serait effondré. Israël a démontré qu’il n’est pas prêt à se lancer dans une guerre et encore moins capable de soutenir une guerre sur de multiples fronts. Pour l’Axe de la Résistance, il fallait absolument que le soutien des populations occidentales, arabes et palestiniennes reste concentré sur un seul objectif et une seule cause.
L’Axe de la Résistance a pu démontrer sa cohésion et le transfert de son expertise lorsqu’un drone en provenance d’Irak a violé l’espace aérien israélien. Selon les sources, le drone a photographié d’importants sites militaires et a transféré ses coordonnées à Gaza, avant de revenir en toute sécurité au lieu de son lancement, un peu comme la Résistance irakienne en proie aux frappes israéliennes l’avait fait lorsque Donald Trump était au pouvoir. Un drone était alors entré dans l’espace aérien israélien sans être détecté par les radars israéliens.
Un autre membre de l’Axe de la Résistance, l’Iran, s’est abstenu de faire des déclarations incendiaires pendant la guerre. Les dirigeants iraniens ne se sont manifestés qu’après l’annonce du cessez-le-feu. Toute tentative de détourner l’attention de Gaza a été évitée.
L’harmonie et le succès de l’Axe de la Résistance ont été possibles parce que ses membres sont les propriétaires légitimes de leurs territoires en Palestine, au Liban, en Syrie, en Irak et au Yémen.
La guerre de Gaza brise le rêve du « Grand Israël » et de son expansion en dehors de la Palestine. Bien qu’Israël se soit bâti sur les guerres et songe toujours à s’étendre, les batailles à venir se feront à l’aide d’avions, de drones et d’artillerie guidée, loin de toute occupation terrestre. Israël demeure évidemment l’armée la plus puissante du Moyen-Orient. Mais elle n’arrive pas à empêcher ses ennemis d’acquérir une technologie militaire et une capacité de missiles perfectionnées lui permettant de frapper ses fronts intérieurs, ses aéroports, ses bases militaires, ses ports et ses plateformes gazières et pétrolières.
Gaza a réussi à lancer 150 à 200 roquettes par jour pendant les onze jours de guerre. Pour sa part, le Hezbollah libanais est en mesure de lancer un millier de roquettes et de missiles quotidiennement. C’est plus que ce que les Israéliens sont capables de contenir. Des leçons ont été tirées de cette guerre, qui a démontré l’incapacité du système d’interception des missiles (qui aurait intercepté 90 % des missiles prétend Israël) à arrêter toutes les roquettes. Gaza a inondé les systèmes d’interception israéliens de roquettes afin de créer une faille permettant le passage de missiles téléguidés plus destructeurs. Israël avait besoin de temps pour recharger ses batteries et a indiqué qu’il ne disposait plus de missiles d’interception en abondance pour contrer les frappes après seulement onze jours à essuyer les tirs de roquettes relativement limités lancées depuis Gaza. Le président des USA Joe Biden a promis de refaire le plein d’unités du Dôme de fer d’Israël. Les résultats auraient été particulièrement graves si Israël avait été contraint de faire face à des fronts multiples provenant de Gaza, du Liban, de la Syrie et de l’Irak.
Le grand djihad
Le chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, a déclaré qu’il s’agissait d’une « victoire stratégique » et que la situation qui prévaut après l’opération « Épée de Jérusalem » n’est plus la même qu’avant. « De nouvelles stratégies seront annoncées et la coexistence avec l’ennemi (Israël) n’est pas possible », a-t-il déclaré.
Le président Joe Biden a annoncé que les USA ne traiteraient pas avec le Hamas, mais avec le président sortant Mahmoud Abbas, au pouvoir depuis 2005, qui refuse de tenir de nouvelles élections sous divers prétextes. Par conséquent, l’objectif d’Israël, des USA et de plusieurs pays de la région (Arabie Saoudite et Émirats) est de priver Gaza des fruits de sa victoire en envoyant toute l’aide humanitaire à Abbas. Le président palestinien ressort comme l’un des grands perdants de cette guerre. L’on s’attend à ce que de nombreux pays tentent de briser l’unité palestinienne créée après cette guerre contre Gaza et de redonner le pouvoir à Abbas. Le président palestinien croit en un dialogue pacifique avec Israël. Sauf que les Palestiniens de nombreuses villes ont démontré que l’accord d’Oslo est mort et enterré et que le seul choix qui leur reste est la résistance armée pour libérer le territoire.
Israël a tué 277 personnes, dont 70 enfants et 38 femmes. Plus de 8 500 blessés ont été rapportés. Les bombardements israéliens contre des habitations civiles ont forcé le déplacement de plus de 70 000 Palestiniens à Gaza. La moitié des victimes de la dernière guerre étaient des enfants, des femmes et des personnes âgées. Israël a détruit 1 800 maisons et 18 centres de santé, a démoli des canalisations de distribution d’eau pour plus de 800 000 personnes, a bombardé des canalisations d’égouts, a dévasté des usines de dessalement de l’eau, a détruit un des deux centres d’approvisionnement en électricité de la ville, a endommagé 14 000 maisons et a forcé des centaines de milliers d’élèves à abandonner leurs études après avoir détruit des écoles à Gaza. La plupart des entrepôts alimentaires et des stocks agricoles ont été bombardés et la moitié des stocks de médicaments de Gaza sont perdus. Israël visait à déloger, appauvrir et affamer la population.
Gaza a accepté ces pertes, car la guerre a donné un résultat significatif en unifiant les Palestiniens et en introduisant une nouvelle stratégie défensive (à l’avenir, Gaza défendra Jérusalem et toutes les villes palestiniennes). Gaza a brisé la dissuasion et la conscience israéliennes. La guerre a prouvé que la normalisation est inutile et que la théorie selon laquelle Israël est invincible et qu’il peut frapper n’importe quel autre pays est sans fondement. Israël n’a pas été en mesure de se défendre efficacement. Son « bras long » a été amputé. Son système de défense antimissile était efficace, mais pas parfait. Il n’a pas empêché les dommages causés à 3 400 bâtiments, la destruction de 1 700 véhicules, la paralysie de son économie et son incapacité à soumettre une zone de 368 kilomètres carrés.
Mais le plus grand djihad et le plus difficile restent à venir : la préservation de l’unité palestinienne, qui représente un défi important pour la Résistance palestinienne. Il s’agit en fait d’un objectif beaucoup plus difficile que la guerre contre Israël, et qui se révélera essentiel.
Conséquences de la guerre de Gaza : Un « plus grand djihad » attend les Palestiniens
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